Les pères, page 3

 

Sommaire

 

Lorsque assumer semble impossible : les différents blocages

 

A noter : il est rare qu'il y ait une seule raison qui justifie la fuite !
Très souvent, il y a plutôt un faisceau de raisons, comme on peut avoir des « faisceaux d'indices » lors d'une enquête criminelle.
Les blocages peuvent donc être divers et variés.

 

1- Blocages liés « à soi-même » : les émotions

 

A- La colère

Phrases clés :

La colère existe souvent des deux côtés et pour des raisons différentes.
Elle n'est pas négative en soi, car son rôle est de signaler une « zone sensible » de votre personnalité qui a été touchée par le comportement d'autrui... Et dans tous les cas, il est important de l'extérioriser !

Mais attention : colère ne veut pas dire violence verbale et encore moins violence physique !!

Idéalement, il faudrait parler en utilisant le pronom "je" (plutôt que le "tu" accusateur... qui n'aidera pas l'autre à vous comprendre !) et la formuler en exprimant ce que l'on ressent.
Bon, certes... plus facile à dire qu'à faire... mais avec un peu d'entraînement (et quelques dérapages ?... Qui n'a jamais insulté quelqu'un sous l'effet de la colère ?), on peut se rapprocher du but ! Si, si !

Quelques suggestions pour la dégager en souplesse :

En tout cas, on le répète : PAS DE VIOLENCE PHYSIQUE !!!

Déjà, il s'agit d'une femme (donc d'un être chiant - on vous l'accorde ! - mais plus faible physiquement que vous) et en plus elle a votre enfant dans le ventre !

Alors si vous avez peur d'exploser ou que vous vous savez sujet à ce genre de comportement : ne la voyez surtout pas seul !

J'ai avorté hier avec beaucoup de douleurs mais je ne remets pas ce choix en cause. Assumer un enfant seule n'était pas un problème, ce qui l'était c'est la personnalité du père qui d'ailleurs ces derniers jours a montré sa possibilité de transformer la vie de mon fils de onze ans et la mienne en enfer.
Je sais que dans ces moments on peut faire ou être n'importe quoi, qu'après cela peut s'appaiser et s'arranger, mais là ce n'est pas le cas, et que parfois dans l'affolement on vit les choses avec démesure et qu'après tout cela nous semble... démesuré. Mais là il aurait surement fallu partir au bout du monde. Les borderline où les personnes à personnalité à état limite sont des gens imprévisibles et quand ils nient leur maladie, c'est l'impossible en ligne de mire.
Ce que j'avais parfois soupçonné, sans vouloir le voir, s'est révélé dans les derniers jours et ce n'est pas la situation particulière qui me fait voir les choses au travers d'un mauvais prisme. Mes amis, ses amis, mes/ses amis ont été présents et m'ont accompagnée dans ce choix.
J'ai donc avorté hier, déjà hospitalisée pour coups et blessures, alors le choix s'est imposé car en plus cela s'est passé devant mon fils. J'en retire une grande honte, ça n'arrive donc pas qu'aux autres. je penserai longtemps à l'enfant que j'ai porté mais parfois sauver la vie qui est présente devient une urgence.
Je lui avais juste demandé ce qui se passerait si je le gardais alors que mon fils était dans sa chambre, en train de jouer en attendant que son père vienne le chercher. Mon bel instit m'a sauté dessus et de coups de pieds dans le ventre en coups de poings sur la figure... Mon fils est arrivé et a hurlé en le tapant...
Bref. Ca ira, il le faudra, la vie reprend toujours le dessus de toutes façons et paradoxalement cela me donne de la force, tout est fini, et si tout est demoli il n'y a plus qu'à constuire, construire c'est créer, créer c'est la vie. Mon fils est parti en vacances chez ses grands-parents, il va bien c'est l'essentiel, mes amis montent la garde, le soleil perce ce matin dans ma chambre, tout est silencieux et calme, la douleur est là mais laisson -la vivre son chemin, je vais aller voir l'océan et le temps jouera pour moi. Merci à toutes de vos messages de votre générosité et plein de bonnes choses pour vous.

Conclusion : exprimez votre colère (sans violence physique) pour éviter qu'elle ne se transforme en rancune et bloque ainsi une éventuelle relation avec l'enfant en se manifestant de manière détournée à chaque fois que la situation se rappellera à votre esprit.

Variante : la colère qui vieillit mal = la vengeance.

Phrase clé :

On en parlera plus loin.

 

autruche

 

B- La honte et la culpabilité

Phrases clés :

La honte est la conséquence de l'abandon de l'enfant (et cela, même si vous êtes convaincu d'avoir les meilleures raisons du monde d'agir ainsi) car vous savez pertinemment que ce dernier peut un jour souffrir de cette situation alors que c'est la seule personne qui ne devrait pas être touchée par la réaction des adultes qui l'entourent.

Très inconfortable à vivre, la honte entraîne dans son sillage tout un lot de secrets, de mensonges, d'insomnies... et de culpabilité !

Même si vous persistez depuis des années dans votre choix (l'abandon) on ne peut que vous conseiller de sortir de cet engrenage... car c'est un véritable cercle vicieux.
Plus vous aurez honte et moins vous pourrez examiner la situation avec le recul nécessaire pour la dédramatiser : bref, plus vous aurez honte, plus vous culpabiliserez et... moins vous vous occuperez de votre enfant, c'est une évidence ! Donc, plus vous aurez honte. Logique !

 

C- La fierté

Phrases clés :

Vous changeriez bien d'avis mais votre fierté, votre « ego » quoi, vous en empèche :
Comme le disait une pub « Y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis » !
Bon, cela dit, lorsqu'on est en plein dans la tempête, la solution n'est pas dans un slogan... On est d'accord.

Effectivement, il peut être difficile de changer d'avis en la matière, car ça donne l'impression désagréable de « donner raison à la mère »... or si vous pensez qu'elle a abusé de votre confiance en faisant cet enfant, c'est bien la dernière chose que vous ayez envie de faire !! Et on peut le comprendre.

Cela dit, il est important de bien distinguer l'enfant de la mère. Vous pouvez parfaitement vous occuper de votre enfant en gardant de la distance avec cette dernière : le conflit est entre adultes et doit rester entre adultes !

 

Et puis vous pouvez vous poser les questions suivantes :
Qu'est-ce qui est le plus important ?
Votre ressenti profond ? (l'envie, finalement, d'assumer l'enfant)
Ou l'apparence que vous montrez aux autres ? (« Je n'en voulais pas, donc je ne m'en soucie pas »)

 

Lorsque la fierté agit comme un frein dans les relations que l'on peut avoir avec autrui, c'est qu'elle n'est pas forcément bien placée. Pensez-y ! (et cela est valable aussi pour les mères, bien sûr !)

Il ne faut pas oublier que la vie est courte et qu'on ne sait pas ce qu'elle réserve... Témoignage tiré du forum :

Bon, ben c'est mon tour de me présenter.
Mère célib comme vous pouvez vous en douter.
J'ai fait la rencontre du père de ma puce il y a plus de trois ans. Au départ et pendant longtemps, relation très platonique puisque nous avions chacun quelqu'un de notre côté.
Puis, en mars 2002, je quitte mes parents pour prendre un appart seule, on a aussi chacun quitté notre copain/copine, et on s'installe ensemble.
En septembre 2002, il me trompe pendant que je suis à l'étranger et je m'en rends compte fin septembre. On se sépare, j'en souffre énormément, je l'aimais d'un amour immense, mais je suis trop fière pour accepter la tromperie, alors il est parti.
Une semaine après notre séparation, j'apprends que je suis enceinte. Il me dit d'emblée lorsque je le lui annonce : "Avorte, je te soutiendrai du début à la fin".
Finalement, je n'ai pas avorté et ça a été le choc pour lui, comme si tout s'écroulait autour de lui. On s'est fait la guerre, moi voulant le garder car j'avais entendu le cœur de mon bébé battre et parce que j'avais déjà un avortement à mon actif, lui n'en voulant pas car entre temps il s'était recasé et était trop jeune pour être père.
Il est allé jusqu'à me faire des menaces de mort sur le bébé. Bref, aucun dialogue possible, et si je le gardais c'était la guerre et plus jamais je n'entendrai parler de lui, ni ne le reverrai, ni moi, ni le gosse. Je n'ai en effet plus eu de nouvelles.
En décembre dernier, je me dis qu'il est injuste que lui n'en veuille pas mais que ses parents à lui n'aient pas la joie de la connaître.
J'appelle donc les grands-parents de ma puce, qui bien sûr n'étaient pas au courant. Je le leur apprends et, malheureusement, eux m'apprennent encore pire : leur fils, le père de ma fille est décédé.
La mère, sous le choc, me demande de lui écrire, ce que j'ai fait quelques jours après : je lui ai écrit une très belle lettre, lui racontant comment j'avais rencontré son fils, ce que l'on a vécu ensemble, la naissance de sa petite-fille et bien sûr aussi que son fils n'était pas prêt encore pour rencontrer ma fille.
Nous sommes le 25 janvier, cela fait cinq semaines que j'ai écrit cette lettre, je n'ai toujours pas de nouvelles des grands-parents de ma fille et je ne sais pas si j'en aurai bientôt.
>Glauque comme histoire. En tout cas, j'aurais préféré être comme vous toutes : que le géniteur soit encore en vie, même s'il ignore son propre enfant !

A noter quand même que cette histoire de fierté est tout à fait paradoxale :

En effet, abandonner votre enfant préservera à priori votre fierté, mais peut-être pas votre estime de vous ! Car vous savez que l'enfant n'y est pour rien : ce n'est pas lui qui a demandé à venir au monde.

Inversement, finir par assumer ce que vous ne vouliez pas au départ revient à renoncer à la sacro-sainte fierté pour se sentir au bout du compte réellement fier de soi-même !
Avouez que c'est tentant, quand même...

Prenez donc le temps d'y réfléchir : le bonheur (d'agir conformément à ce que l'on pense "juste") n'est peut-être pas très loin, en fait.

En tout cas, si le conflit entre votre décision initiale et votre nouvelle impulsion est trop fort, il serait bien d'en parler avec une personne neutre (un psy par exemple) ou de venir en discuter sur notre forum.

 

2- Les blocages liés « aux autres »

 

A- Les blocages liés au contexte : l'un des parents est déjà marié.

Phrases clés :

Ce blocage est souvent associé à la honte dont on a parlé plus haut : un double blocage, donc ! (Quel chanceux !!)
Les deux cas (homme marié ou femme mariée) sont bien différents mais il faut savoir qu'il est possible de reconnaître un enfant même en restant marié et que ça n'empêche aucunement de l'assumer.

Certes, ça reste délicat dans un tel contexte, mais c'est possible. On en reparlera dans le détail plus loin.

 

B-Les blocages liés au non-dits.

Il y a deux types de secrets : ceux qui sont liés au présent (votre enfant) et ceux qui sont liés à votre passé (votre enfance) avec le cas particulier de la "loi des séries".

Phrases clés des secrets liés au PRESENT (à l'enfant) :

Lié à la honte, lui aussi (décidément ! Elle en fait faire des conneries, celle-là !)
Attention ! Ce type de secret touche à l'identité ou à l'existence d'autres personnes !! Il ne vous appartient donc pas. En ne parlant pas, vous évitez en fait de montrer une face sombre de votre personnalité.

Bon. Lorsque ça ne concerne que vos amis... passe encore. On peut l'admettre. Mais lorsque ça touche à votre famille : là, désolée, on ne peut pas aller dans votre sens. C'est trop important. Car vous privez vos parents et les autres membres de votre famille (vos autres enfants, vos frères et vos sœurs, etc.) du droit d'entretenir des relations avec votre enfant.

Et vous privez aussi ce dernier du droit de profiter de sa famille paternelle :

C'est inadmissible.

Si vous êtes dans ce cas, on ne saurait trop vous conseiller de réagir et de changer de cap avant qu'il ne soit trop tard (trop tard = décès de l'un des protagonistes).

Une seule solution intelligente et libératrice : parler !
Et venez sur le forum, on est là pour vous aider.

En tout cas, n'oubliez pas que les secrets perturbent des générations entières qui se suivent et se ressemblent malheureusement dans les grandes lignes.

Phrases clés des secrets liés au PASSE (à votre enfance) :

Liés à la honte, encore, mais celle de la victime, cette fois. Elle n'est pas négative, elle est protectrice. Du moins pour un temps, celui de l'agression. Pour « sauver » sa peau, quoi.
Ces secrets-là vous appartiennent. A vous de voir ce que vous souhaitez en faire.

C'est en tout cas pour ça que vous vous étiez juré de ne pas être père. Le flux de la vie vous a rattrapé mais la souffrance que vous ressentez est énorme. Et vous ne gérez pas.

Il n'y a que la parole (ou l'art qui est un autre moyen d'expression quand la parole est impossible) qui peut vous aider à vous libérer de ce qui vous mange de l'intérieur.

A lire absolument si vous êtes dans ce cas : « Le poids des secrets de famille » d'Evan Imber-Black.

Phrase clés liées aux secrets particuliers : la loi des séries

Parfois, les hommes qui abandonnent leur enfant ont été touché par l'abandon.
Directement, en ayant été poussin eux-mêmes : la paternité est alors difficile à accepter car la souffrance est encore vive.
Ou bien indirectement : ce sont leurs parents qui ont été abandonnés. Ce qui est difficile, là, c'est d'avoir l'impression de faire partie d'un « mouvement » dont on ne maitrise pas la direction.
On en parlera dans la rubrique concernant les répétitions familiales.

Ce secret-là ne vous appartient pas totalement. Il appartient aussi à votre enfant. C'est son histoire familiale.

 

Dernière mise à jour le 23 décembre 2013

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